affiche film

© Les films du Whippet

LES DERNIERS JOURS DE L’HIVER

(Akharin rouzhaye zemestan)


un documentaire de Mehrdad Oskouei

À l’approche du Nouvel An, la camĂ©ra nous propose de suivre le quotidien de sept jeunes adolescents au cƓur d’une maison de correction Ă  TĂ©hĂ©ran...


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Photo film

Un sujet fort mais difficilement exploitable

Le rĂ©alisateur iranien Mehrdad Oskouei a dĂ©cidĂ© de s’intĂ©resser Ă  la question Ă©pineuse des conditions de dĂ©tention de la jeunesse dans son pays. Écartant toute dĂ©monstration politique ou aspect contestataire, il se focalise sur l’humain, sur les relations qui se forment entre ces jeunes voleurs et/ou camĂ©s. Face Ă  la camĂ©ra, les ados vont se livrer, sans concession, sur leur quotidien, leur avenir, ou encore leur vision du monde. Pour la premiĂšre fois, une camĂ©ra a pu pĂ©nĂ©trer les murs d’une maison de correction iranienne. Le documentariste va alors en profiter pour structurer sa chronique de la jeune dĂ©linquance autour d’interviews de dĂ©tenus mais Ă©galement autour de moments de vie qu’il filme comme un simple spectateur.

Et c’est bien lĂ , la vĂ©ritable lacune du projet. Oskouei se refuse Ă  manifester un quelconque point de vue, une critique du systĂšme carcĂ©ral ou de la dictature qui sĂ©vit en Iran. Certainement contraint par les autoritĂ©s locales, celui-ci se retrouve Ă  filmer des conditions de dĂ©tention s’apparentant au quotidien d’une colonie de vacances : les enfants passent leur temps Ă  jouer, regarder la tĂ©lĂ©vision, s’exalter devant leurs joueurs de foot prĂ©fĂ©rĂ©s, ceci lorsqu’ils ne sont pas en sortie (parce que oui, dans les maisons de correction iraniennes, les enfants partent en vacances voir la mer dans la joie et la bonne humeur, avec plein de cadeaux en prime).

Si l’obscuritĂ© qui entoure le systĂšme carcĂ©ral laisse planer un doute, malgrĂ© toute la bonne foi du monde, cette rĂ©alitĂ© filmĂ©e semble ĂȘtre fortement enjolivĂ©e, si ce n’est transformĂ©e en fiction. Dans un format trĂšs tĂ©lĂ©visuel, le documentaire multiplie alors les raccourcis, ne pointant aucune ambiguĂŻtĂ© sur la personnalitĂ© de ces ados. À chaque plan, il nous est rappelĂ© lourdement que ceux-ci restent avant tout des enfants (avec des gros-plans sur leurs poupĂ©es, leurs doudous ou leurs jouets) que seul Dieu pourra sauver. Mais Ă  force de grossir le trait, on se met Ă  douter de tout, de la sincĂ©ritĂ© des enfants, de la vĂ©racitĂ© de leurs propos, de la pertinence des questions du documentariste et on en vient mĂȘme Ă  se demander si tout cela n’est pas un vaste traquenard ou spot publicitaire pour les maisons de redressement. Évidemment, les tĂ©moignages des enfants Ă©meuvent, leur maturitĂ© et leur pragmatisme nous dĂ©routant tandis que l’émotion est palpable lorsqu’ils racontent leurs relations familiales ou la tristesse de leur existence. C’est ainsi avec sensibilitĂ© et dĂ©licatesse que sont filmĂ©s leurs petits mensonges Ă©vidents, les histoires qu’ils s’amusent Ă  rĂ©vĂ©ler Ă  la camĂ©ra. Malheureusement, l’impression de faux ne parvient jamais Ă  quitter notre esprit.

L’intĂ©rĂȘt du documentaire tient alors en sa chance d’ĂȘtre le premier Ă  pĂ©nĂ©trer les façades barbelĂ©es des maisons de correction iraniennes. Il est aussi le tĂ©moin de l’instrumentalisation de la religion dans le rĂ©apprentissage de la vie, l’importance de l’éducation Ă©tant Ă©clipsĂ©e par le salut divin. En filigrane, se dessine Ă©galement la violence sociale d’un peuple oppressĂ©. S’inscrivant dans les thĂšmes affectionnĂ©s par le cinĂ©ma iranien (l’enfance, l’éducation, l’introspection ou encore la quĂȘte d’identitĂ©), le film a le mĂ©rite de donner la parole Ă  ces enfants. Si l’aspect humaniste du projet fonctionne, offrant Ă  ces jeunes gens une belle façon de pouvoir s’exprimer, l’absence de dimension politique attĂ©nue le propos et la force du documentaire. Dommage !

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