© Sophie Dulac Distribution
Le 4 novembre 1995, le Premier Ministre israélien Yitzhak Rabin, membre du parti travailliste, fut abattu par trois coups de révolver, alors qu'il venait d'intervenir lors d'une manifestation pour la paix à King's square à Tel Aviv...
Choisissant une voie à mi-chemin entre documentaire et reconstitution, l'auteur israélien Amos Gitaï revient sur le devant de la scène avec "Le Dernier jour d’ Yitzhak Rabin", après quelques années de vaches maigres. Connu pour des films engagés et dérangeants, questionnant le fonctionnement ou le comportement de l'armée, la place de la femme, et mettant toujours en avant les tensions entre Israéliens et Palestiniens ("Kedma", "Kippour","Free Zone"), il tente ici d'approcher divers dysfonctionnements qui auront mené à la mort du Premier Ministre, alors que le processus de paix semblait en bonne voie.
En mélangeant interviews (le film s'ouvre notamment sur celle de Shimon Perez, l'allié de toujours de Rabin), images d'archives (des vues aériennes sur la place ou ses alentours, l'annonce de la mort de Rabin...), et reconstitutions minutieuses, Amos Gitaï tente de remettre en ordre les dysfonctionnements qui auraient mené à la mort de Rabin. Sans pointer du doigt un unique responsable, il tente de mettre en évidence une déferlante de haine, provoquée par les idées mêmes d'une possible paix (avec la création d'un État palestinien).
Au-delà de témoignages situés dans un carcan officiel, Gitaï donne ainsi à voir l'état d'esprit délétère de l'époque, les appels à la violence perpétrés par des religieux, le non-respect des engagements pris par l'État... Si l'aspect solennel de la mise en scène façon docu-thriller permet de provoquer l'étonnement et la révolte, la démonstration passe malheureusement par une sobre mais un peu rébarbative reconstitution de la commission d'enquête ayant interrogé témoins, policiers, gardes du corps, médecins, c'est-à-dire tous ceux qui ont approché l'homme dans ses dernières heures.
Sur un rythme volontairement posé, le film n'évite toutefois pas les écueils d'une démonstration appuyée concernant l'aspect illuminé des plus véhéments. La scène de plaidoyer d'une psychologue prétendant que Rabin était schizophrène en est un des exemples criants. Montrant clairement les contradictions entre religion et comportements belliqueux (les colons exhibant Torah et armes sur la même table), il met les points sur les « i » concernant l'aspect galopant de la colonisation (41 colonies avec 4 400 habitants en 1877 contre 120 et 100 000 habitants en 1992), et sur le rôle du Likud et de l'éducation imposée par les parents dans l'incitation à la haine (leur manif où l'on voit un enfant crier « à mort Rabin »).
C'est donc un certain intégrisme qu'il dépeint, tout autant que le laisser-faire d'autorités ballottées entre souci d'éviter une guerre civile et besoin de trouver une solution au conflit avec la Palestine. Loin d’entériner les pistes d'un complot à la façon du "JFK" d'Oliver Stone, Amos Gitaï choisit de mettre en évidence les failles (manque de contrôle à l'entrée de la place, temps longs pour parvenir à l'hôpital…) ainsi que la responsabilité de toute une population. Au final, il réussit à induire une certaine inquiétude, et à créer ponctuellement une émotion morbide (la lecture des causes de la mort par le médecin...).
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