© Wild Bunch Distribution
Un jeune garçon de six ans et sa mère passent devant la juge du tribunal des affaires familiales. Exaspérée, la mère finit par piquer une crise de nerfs et jette le sac contenant les affaires du petit au visage de la juge. C'est le début d'un long parcours pour Malony, de foyers en centres éducatifs fermés...
Dès la première scène de son nouveau long métrage, Emmanuelle Bercot ("Elle s'en va") nous saisit. En choisissant, lors de l'audition de la mère, de ne montrer que le visage de son fils, évitant ainsi le regard des adultes ou même leurs expressions, elle provoque d'emblée chez le spectateur l'empathie et l'inquiétude pour ce mioche dont on suivra, par la suite, les agissements jusqu'à sa majorité. La réalisatrice cherchera alors à nous sensibiliser à une cause, celle de l'insertion dans notre société, en nous montrant comment la justice et le système éducatif se relaient pour permettre à un jeune homme de trouver sa voie, autrement que dans le rejet des autres.
Réussissant à personnifier la jeunesse en détresse et en difficulté d’adaptation, Emmanuelle Bercot adopte aussi un point de vue assez rare, consistant à valoriser ceux qui par leur persévérance refusent d'abandonner des enfants à un sort prédéterminé. Dans "La Tête haute", chaque personnage transpire ainsi le vrai et chaque interprète porte une incarnation, de Catherine Deneuve en juge compréhensive mais autoritaire, à Benoît Magimel en éducateur borderline, en passant par Sarah Forestier (juste saisissante) en mère indigne et irresponsable, sans oublier Rod Paradot, la révélation du film, tout en défiance, en colère ravalée et avec la peur de se confronter au monde réel.
Avec force ellipses, Emmanuelle Bercot capte des moments d'une dureté abrupte, saisit les colères, les explosions soudaines, les attentes qu'on ne dit pas comme les espoirs déçus. Si la réalisatrice reste volontairement abstraite sur le fonctionnement du système judiciaire, notamment avec l'emploi d'un vocabulaire au premier abord déroutant, cumulant les sigles et les acronymes, elle est beaucoup plus limpide vis-à-vis de l'humain. Elle capte, en effet, avec une certaine virtuosité la nervosité, les coups de sang, la douceur refusée, la progressive conscience d'une responsabilité… Dénonçant au passage des comportements de parents pensant avant tout à eux-mêmes (dans une scène terrible de parloir, la mère balance un immonde : "Je ne peux pas me permettre de t'attendre"), le scénario vise juste et marque, au final, à la fois un refus de la fatalité et une certaine affirmation de la croyance en des institutions souvent décriées.
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