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Le « boson de Higgs » découvert par de nombreux scientifiques (dont les physiciens François Englert et Peter Higgs) est une particule élémentaire qui constitue l’une des clefs de voûte du modèle standard de la physique des particules. La confirmation de son existence a été faite grâce au LHC, un accélérateur de particules d’une longueur de 27 kilomètres, mis en fonctionnement par les scientifiques du CERN (Centre Européen de la Recherche Nucléaire). C’est au sein de ce bâtiment situé à côté de Genève qu’une poignée de physiciens tente alors de percer le mystère de l’univers…
Non, ne fuyez pas ! Si vous n’êtes pas un spécialiste de la physique des particules, si votre connaissance du tableau périodique des éléments se limite aux codes « H » et « He », ou si vous n’avez jamais entendu parler du concept de « super-symétrie », "La fièvre des particules" n’a aucun risque de vous laisser sur le bord de la route. Paradoxe suprême : le documentaire de Mark Levinson n’est même pas du genre à enfiler les explications scientifiques pour neuneu façon C’est pas sorcier, où un type à lunettes va utiliser un schéma en carton-pâte tout en donnant l’impression de s’adresser à des attardés. Non, nous sommes dans un vrai film de cinéma, magnifiquement construit par un homme qui connaît très bien son sujet (il est détenteur d’un doctorat en physique des particules à l’université de Berkeley), où le sentiment d’immersion en terre inconnue, l’efficacité prenante d’une narration gorgée de suspense, la virtuosité des effets de style (souvent insérés avec brio dans des plans réels) et la précision surnaturelle du montage (signé par l’immense Walter Murch, excusez du peu !) réussissent à susciter la curiosité pour le sujet et la fascination envers la passion de tous ceux qui y consacrent leur vie.
Pour tenter d’illustrer l’effet produit par le film, disons que nous sommes comme de petites particules tournoyant autour d’un atome, potentiellement plus grand, dont la masse et les enjeux semblent sans cesse nous dépasser. C’est un peu aussi ce qui parcoure la plupart des intervenants (six au total), tous scientifiques et chercheurs dont le travail se résume à une idée simple : partir de l’abstrait – en générale une théorie énoncée par des scientifiques renommés – pour en faire du concret. D’où l’impression de vivre chaque seconde de ce travail expérimental en compagnie de personnes attachantes, pleines d’espoir envers les possibles répercussions futures de leurs travaux tout en étant conscientes de devoir se mesurer à de nombreux échecs. C’est aussi bien leur patience que leur excitation que l’on ressent dans chaque scène, sans que le réalisateur n’éprouve le besoin d’y ajouter des explications théoriques en guise de contrepoint. Le didactisme du film se limite tout juste à quelques schémas visuels à la fois ludiques et très concis, mis en parallèle avec le contenu des entretiens et non pas avec une banale voix-off à vocation pédagogique.
En outre, le point d’orgue du film réside paradoxalement dans les moments où le réalisateur s’autorise des parenthèses introspectives sur le sujet. Dans ces moments-là, Levinson prend soin d’établir un parallèle entre ce travail de recherche en physique et les différentes formes d’art, notamment le cinéma (on cite ici l’exploration de la grotte Chauvet par Werner Herzog). Ici, de par les aveux de certains scientifiques qui évoquent leur parcours personnel, l’apprivoisement de la physique rejoint sur de nombreux points celui de la composition musicale, de l’activité sportive ou même de la beauté dans l’art. Il suffit de voir comment une simple partie de ping-pong peut soudainement évoquer un clash de particules physiques, ou comment une sculpture très étrange peut susciter chez le scientifique des hypothèses sur la matière et les problèmes de masse. Un détail qui change tout et qui suffit amplement à nous faire sortir du film avec des particules plein les mirettes.
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