© Shellac
Lorsque vous êtes une jeune journaliste, couvrir l’élection de François Hollande devant le siège du parti socialiste est une grande opportunité. Mais lorsque votre ex-mari veut régler vos problèmes conjugaux ce même-jour, c’est un beau bordel…
Pour son premier long métrage de fiction, Justine Triet retrouve la rue de Solférino, lieu qu’elle connaît bien pour avoir déjà réalisé un documentaire sur l’élection présidentielle, "Solférino", en 2007. Et pour ce premier essai, la jeune cinéaste n’a pas choisi la facilité en décidant de mêler fiction et réalité, avec tous les aléas que cela comporte. Elle plonge ainsi, au milieu de la foule rassemblée devant le siège du parti socialiste, une jeune journaliste qui va devoir régler ses problèmes conjugaux, sans pour autant faire capoter son direct. Et rapidement, la journée se transforme en véritable cauchemar…
Comédie loufoque à l’énergie débordante, le film développe une tension permanente et une hystérie collective des plus savoureuses. Laissant la part belle à l’improvisation, la réalisatrice nous balade entre l’appartement de la journaliste et la masse informe constituée par les sympathisants, et il est alors bien difficile de distinguer les comédiens des simples militants. Les répliques fusent, les gags s’enchaînent dans une parfaite cacophonie, la réalisatrice nous dressant un subtil portrait d’une génération désabusée, symbolisée par un couple à la précarité apparente, qu’elle soit morale ou économique. En mêlant l’intime à l’évènement public, Justine Triet multiplie les corrélations et les métaphores sur une France aux abois, tout en ne s’éloignant jamais de son propos initial, à savoir le drame conjugal qui oppose les deux protagonistes.
Néanmoins, la singularité de ce projet innovant s’estompe au fur et à mesure qu’on s’enfonce dans l’espace clos de l’appartement de la reporter. Progressivement, les comédiens patinent, le scénario s’enlise et la fin ne fait que s’éterniser. En cherchant à nous étouffer aussi bien par la foule que par une ambiance anxiogène, la réalisatrice commet quelques faux pas qui altèrent notre plaisir. Mais ces bémols ne sauront entacher la qualité de cette comédie qui brise les standards habituels, osant un cinéma risqué et des situations caricaturales pour décrire frontalement une réalité inquiétante.
Aussi rythmé qu’un concert de rock, la cinéaste parvient l’exploit de nous offrir un métrage survitaminé, malgré une mise en scène des plus calmes. Dynamisé par un excellent montage et par le talent des acteurs, dont la nouvelle coqueluche de la comédie « hype », Vincent Macaigne ("La Fille du 14 juillet"), "La Bataille de Solférino" marque les débuts d’une réalisatrice à suivre.
LA BANDE ANNONCE
Cinémas lyonnais
Cinémas du Rhône
Festivals lyonnais