© 20th Century Fox France
LâĂ©lite du renseignement britannique en costume trois piĂšces subit un terrible revers : chacune des installations de lâorganisation Kingsman se retrouve anĂ©antie par une puissance inconnue, le Cercle dâOr. Seul espoir pour les deux seuls survivants de lâĂ©quipe : sâassocier avec leur alter ego amĂ©ricain (lâorganisation Statesman) pour sauver le mondeâŠ
La tornade "Kingsman" avait rĂ©ussi lâimpossible : sous lâimpulsion dâun Matthew Vaughn que lâon savait virtuose mais quand mĂȘme pas aussi vĂ©nĂšre dans son ton punk, cette claque cinĂ©matographique avait su renvoyer James Bond Ă la crĂšche, crĂ©er des personnages dĂ©calĂ©s Ă forte dose culte, fracasser tous les codes du film dâaction par un post-modernisme des plus revigorants, et Ă©lever le taux dâultra-violence dĂ©complexĂ©e vers son zĂ©nith. Se farcir une suite Ă©tait plus que tentant, surtout avec Vaughn lui-mĂȘme aux commandes. Sauf que, donnĂ©e importante, repousser les curseurs dâun univers prĂ©dĂ©fini au travers dâune suite implique dâen Ă©lever la folie tout en la rĂ©gulant par un ton homogĂšne et une mise en scĂšne maĂźtrisĂ©e de bout en bout. LĂ -dessus, quâon se rassure, le piĂšge a Ă©tĂ© Ă©vitĂ©. Ce que Vaughn a visiblement oubliĂ© concerne en revanche le point fatal de toute suite : la surenchĂšre. Soit le piĂšge dans lequel tombent 90% des sĂ©quelles de film dâaction, et qui, Ă force de vouloir aller plus vite et plus loin que la pensĂ©e du spectateur, finissent un peu par Ă©puiser ce dernier. Sans aller aussi loin que Michael Bay (dĂ©finitivement perdu depuis quelques annĂ©es), le rĂ©alisateur de "Layer Cake" sâest quand mĂȘme un peu pris les pieds dans les fils de sa gourmandise.
Le cinĂ©aste dĂ©ploie mine de rien son gĂ©nie de la mise en scĂšne dans des passages qui filent un tournis magistral (il y a tant de travellings impossibles Ă recenser lĂ -dedans !), multiplie son appĂ©tit de violence gore par trois (on compte au moins cinq scĂšnes qui Ă©galent en folie dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e le carnage Ă©piscopal du premier film !) et use dâun ton mal Ă©levĂ© qui provoque de gĂ©nĂ©reux fous rires (mention spĂ©ciale Ă lâinvitĂ©-surprise qui en fait des caisses pour singer son image mĂ©diatique !). De ce fait, il est difficile de rechigner face Ă un spectacle qui met autant la tĂȘte Ă lâenvers â les 2h20 passent ici Ă la vitesse dâun TGV. En fait, si lâon voulait rĂ©sumer ce qui ne va pas, on pourrait dire que "Kingsman 2" se veut beauf lĂ oĂč son prĂ©dĂ©cesseur Ă©tait clairement punk. Tout ce qui fait lâidentitĂ© premiĂšre de cette suite se rattache surtout Ă lâidĂ©e dâune cour de rĂ©crĂ©, dâun terrain de jeu oĂč tout serait permis et oĂč la question de la vraisemblance ne se pose plus du tout. Câest Ă la fois une force â on se croirait souvent en plein cartoon trash â et une faiblesse â on a parfois lâimpression dâassister Ă une parodie. Car, oui, en raison dâune structure narrative quasi identique (Vaughn et ses scĂ©naristes ne se sont pas fait mal aux neurones) et dâune « rĂ©surrection » de Colin Firth qui frise lâopportunisme (lâexplication flirte avec le foutage de gueule), rien dans cette suite ne signe lâenvie de transcender un modĂšle existant. Seul compte le dĂ©sir dâen faire plus, et donc dâen faire trop.
Les grands moments de cinĂ©tisme dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© vont ici de pair avec un film qui, gavĂ© jusquâĂ lâexplosion, affaiblit la portĂ©e de son rĂ©cit. Il en va de mĂȘme pour le propos du film, montrant le soulĂšvement de lâorganisation Kingsman contre une vilaine au sourire crispĂ© (Julianne Moore en mode "Stepford Wives") qui menace de zigouiller tous les droguĂ©s de la planĂšte et un prĂ©sident amĂ©ricain qui se rĂ©vĂšle tentĂ© dâen tirer profit pour appliquer sa politique « tolĂ©rance zĂ©ro ». Mais la subversion du premier opus a un peu changĂ© de visage, plus proche de la grosse blague sans complexe qui fait effet en vomissant le libĂ©ralisme hygiĂ©niste de lâOncle Sam mais avec un taux de cholestĂ©rol trop Ă©levĂ©. Un peu comme si Vaughn avait rĂ©gressĂ© de lâado punk vers le teenager boutonneux, trop soucieux de tĂącher chaque situation et chaque ligne de dialogue en crevant le plafond de lâoutrance. On ne peut pas nier quâon sâest quand mĂȘme amusĂ© Ă le voir pousser le bouchon aussi loin. On ne peut pas non plus sâempĂȘcher de penser quâil a atteint lĂ son point limite. La saturation nâest pas loinâŠ
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