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Californie, 2001. Devant un public d’afficionados, un charismatique chef d’entreprise présente sa nouvelle révolution technologique : une lecteur musical de poche permettant de stocker et écouter plus de 1000 titres numérisés. Cet objet c’est l’IPod, et son créateur c’est Steve Jobs, fondateur 25 ans plus tôt de la légendaire société d’informatique au logo en forme de pomme…
Décédé en 2011 des suites d’un cancer, Steve Jobs est sans doute l’un des chefs d’entreprise les plus célèbres et adulés de notre époque. Célèbre pour son caractère autoritaire, impitoyable même, et son style de management sans concessions. Adulé pour son esprit entrepreneurial, perfectionniste et visionnaire, auquel on attribue de nombreuses révolutions dépassant le simple champs de la technologie. Le succès planétaire d’Apple, exacerbé par l’instauration d’une véritable culture « Mac » et d’un art poussé du storytelling (souvenez-vous du spot de lancement du MacIntosh, en 1984, réalisé par… Ridley Scott !), est d’autant plus fascinant qu’il s’agit d’une entreprise née dans un garage et façonnée par un duo de jeunes hippies (Jobs et Wozniak), sous l’emprise de la musique de Dylan et du LSD. Pas de doute donc : entre la légende d’Apple et celle de son principal créateur, nous tenions là un double-sujet particulièrement inspirant, encore inexploité cinématographiquement, et un succès public quasiment assuré d’avance.
Pourtant, Joshua Michael Stern rate complètement son film. On pouvait accorder à ce réalisateur inconnu au bataillon (ses deux précédents films, "Neverwas" et "Swing Vote", n’ont pas eu les honneurs d’une sortie dans les salles françaises) le bénéfice de l’anonymat pour apporter un peu de fraîcheur et de folie à un biopic qui se devait être tout sauf classique. Or non seulement le film n’atteint pas la dimension épique escomptée, mais il semble être en permanence à contretemps, et ce à tous les niveaux. Ainsi, les étapes du récit qui pourraient permettre au film de s’envoler semblent bâclées, tandis que celles qui appartiennent au registre plus convenu de la biographie (les inspirations bouddhistes de Jobs, ses premiers pas dans la création de son entreprise, l’arrivée du succès…) sont maladroites et ankylosées, tuant dans l’œuf tout espoir d’enchantement pour le spectateur. Le classicisme de la mise en scène, en totale dissonance avec son sujet, est aussi un lourd coup porté au métrage. Seule issue à l'ennui : s’intéresser aux efforts de reconstitution des années 1970 et 1980, il est vrai soignée.
Le film soulève par ailleurs de vrais problèmes d’écriture, et ce à deux niveaux. D’une part d’un point de vue strictement narratif : les choix d’éluder certains aspects de la vie de Jobs, de son rôle par rapport à Apple et de la diversification de ses activités (Pixar !) n’est pas toujours très profitable à la compréhension générale et à la fluidité de l’ensemble. D’autre part d’un point de vue du storytelling pur et dur : jamais Joshua Michael Stern ne parvient à nous embarquer dans ce qui devrait être une véritable épopée, un destin extraordinaire, et qui manque cruellement d’envergure et de vertige à l’écran. Quant à l’interprétation de Ashton Kutcher, sur les épaules duquel repose une grande partie de l’efficacité du film, il n’est tout simplement pas à la hauteur. Au-delà de ses efforts louables de mimétisme de Steve Jobs, et de sa relative ressemblance physique, il ne parvient pas à investir son personnage ni à restituer sa complexité, tombant régulièrement dans l’imitation et le sur-jeu. Et malgré la qualité de l’interprétation du reste du casting (mention spéciale à Dermot Mulroney, qu’on découvre bon acteur), on demeure sans cesse en attente d’une étincelle qui ne viendra jamais.
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