affiche film

© Bac Films

JE NE SUIS PAS UN SALAUD


un film de Emmanuel Finkiel

avec : Nicolas Duvauchelle, Mélanie Thierry, Driss Ramdi, Johann Soulé, Maryne Caron, Nicolas Bridet, Antoine Gouy, Maryne Bertieaux...

Un soir, Eddie est agressé dans la rue par plusieurs personnes. Lors de son interrogatoire par la police, il désigne à tort un certain Ahmed, qu’il avait aperçu dans un stage de formation quelques jours auparavant. Eddie tente ensuite de se relever de ses blessures, aidé par sa femme et son fils avec qui il se réconcilie. Il trouve même un nouveau travail. Or, plus les jours passent, plus l’enquête sur son agression tend à ne plus pouvoir démontrer la culpabilité d’Ahmed. Eddie se retrouve donc pris à son propre piège…


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Photo film

Les blessures intérieures

L’affiche est déjà un coup de poing en soi. Visage fermé et – légèrement – menaçant de Nicolas Duvauchelle sur lequel se superposent des lettres jaunes qui contrastent avec le reste de l’image. Il faudra attendre le dernier quart d’heure du film d’Emmanuel Finkiel ("Voyages") pour prendre le véritable pouls de cette photo et de ce qu’elle représente – à savoir un condensé parfait de tout le film. Dire que le film ne tiendrait que sur la prestation hautement césarisable de Nicolas Duvauchelle ne serait pas trop exagérer, l’acteur révélé chez Claire Denis ("Beau travail") et Erick Zonca ("Le petit voleur") ne s’étant jamais révélé aussi habité, aussi impliqué, et surtout aussi ambigu. Son personnage ? Pas un salaud, c’est sûr. Pas un homme bien, c’est tout aussi sûr. Juste un paumé si hanté par la peur de devenir faible et si obsédé par son désir maladif de supériorité qu’il se retrouve inexorablement poussé vers le pire.

Il suffit à ce banal chômeur de subir une violente agression pour que tout bascule : sa femme qui l’avait mis à la porte se met soudain à le recueillir, elle va même jusqu’à lui trouver un CDD dans le magasin où elle travaille ; même son fils finit par se sentir fier de lui. Tout va bien, donc ? Non, tout va mal. Parce que cet homme, profondément immature, ne peut s’empêcher de tout faire foirer : son ambition le pousse à considérer ce CDD comme insuffisant, ses crises de colère effrayent à nouveau sa famille, et surtout, lorsque la police lui demande d’identifier son agresseur, il prétend reconnaître un jeune Arabe qui hurle son innocence. Or, on suppose déjà que ce dernier est innocent, puisque la scène d’ouverture nous l’a déjà présenté dans un stage en entreprise, où il semblait bien plus à l’aise que son futur accusateur – toujours une histoire de jalousie. Le début de la descente aux enfers d’un pur masochiste, aussi médiocre que tragiquement humain dans ses actes.

Pour refléter au mieux ces blessures intérieures, la mise en scène de Finkiel se fait aussi mentale que possible, exploitant au maximum les décors (cette façon de cadrer le personnage derrière des vitres isolantes rappelle le cinéma d’Atom Egoyan) et usant d’un découpage très précis où chaque plan semble vibrer de l’intérieur. Ou comment évoquer visuellement et symboliquement la dualité d’un homme qui, à force d’être incapable d’accepter sa propre faiblesse, laisse son côté obscur ressurgir, et ce jusqu’à la plus suicidaire des actions. On peut regretter que le metteur en scène se sente parfois obligé d’en recourir à des dialogues un peu illustratifs là où ses cadres à la Haneke, déjà forts évocateurs en l’état, suffisent à tout raconter sans recourir au verbe. De même que ce final à la sauce "Elephant", aussi percutant soit-il, sonne un peu décalé par rapport au reste. Mais tout comme son protagoniste, ce film ne cherche pas à être aimable. Il ne vise qu’une chose : déranger, au risque de faire très mal. Et cela fonctionne très bien.

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