affiche film

© The Walt Disney Company France

IRON MAN 3


un film de Shane Black

avec : Robert Downey Jr., Gwyneth Paltrow, Don Cheadle, Ben Kingsley, Guy Pearce, Rebecca Hall

Après ses péripéties avec les Avengers, Tony Stark se trouve confronté à un mystérieux terroriste oriental, le Mandarin. À mi-chemin entre Kadhafi et ben Laden, celui-ci provoque des attentats sur le sol américain avant d’envoyer des vidéos de menaces sur tous les réseaux télévisés du pays, en visant directement le président. Quand son garde du corps est grièvement blessé lors d’une explosion à Los Angeles, Stark met au défi le Mandarin de venir le chercher chez lui…


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Photo film

Tony, truand ?

Malgré un premier opus très réussi, l’Homme de fer s’est progressivement transformé en vulgaire canette de soda. On repense avec tristesse à ces scènes de "Iron Man 2" où Tony Stark, alcoolisé jusqu’aux os, urinait dans son armure tandis que son ennemi incarné par Mickey Rourke beuglait pour qu’on lui ramène son oiseau de compagnie face à un Sam Rockwell complètement dépassé. Le troisième opus a voulu remettre les choses à plat en installant Shane Black au scénario et à la mise en scène – un choix amusant quand on se rappelle que Black est l’auteur des "Arme Fatale" réalisés par Richard Donner et le papa de "Kiss Kiss, Bang Bang", le film qui avait relancé la carrière d’un certain Robert Downey Jr. "Iron Man 3", sur le papier, avait tout pour rassurer, sauf peut-être l’idée de devoir supporter des lunettes 3D pendant deux heures. Et pourtant, en quelques minutes de film, tout s’écroule. Qui est responsable ? Qui doit démissionner ?

Faut-il montrer du doigt l’empire Mickey ? Faut-il s’interroger sur l’édulcoration probable des films de super-héros depuis que Disney a racheté les droits des productions Marvel en 2009 ? Oui et non. Car toute l’irrévérence de Shane Black est bien là, saupoudrée dans les dialogues et quelques situations humoristiques, et heureusement puisqu’en fin de long-métrage c’est à peu près tout ce qu’il nous reste d’enthousiasmant à retenir. Au-delà de ces moments de gaudriole où cet épisode 3 s’apparente plus à un buddy movie à l’ancienne (alternativement Tony Stark et un gamin rencontré dans un bled paumé, puis Tony Stark et son acolyte James Rhodes / Don Cheadle) qu’à l’un des deux opus précédents, tout le reste du film fait appel à la partie primitive de notre cerveau : celle qui ne s’inquiète surtout pas de réalisme, de vraisemblance ou de logique narrative. C’est là que la question sur Mickey fait retour : "Iron Man 3" aurait-il à ce point recherché le consensus, esthétiquement et narrativement parlant, si une autre firme eût été aux commandes ? Sans doute, au vu du très mauvais second épisode, pourtant Marvellisé à 100%.

La faute aux acteurs, alors ? Pas du tout. Ils sont même plutôt bons dans l’ensemble, et du moins prennent-ils vraiment au sérieux leurs personnages aussi ridicules soient-ils – Guy Pearce est en cela exemplaire, car son « méchant » dénué du minimum syndical d’ambition cohérente n’est pas tout à fait un cadeau, bien qu’il parvienne par miracle à en tirer quelque chose. On apprécie de retrouver Robert Downey Jr. en Stark mais – et c’est sans doute l’effet post-"Avengers", comme lorsqu’on se sent brusquement seul après avoir passé plusieurs jours en bonne compagnie – ses facéties sonnent moins justes que d’habitude. Est-ce sa romance fictionnelle avec Gwyneth Paltrow qui le ramollit et fait fondre sa carapace de métal ? Heureusement, l’atout charme est personnifié par Rebecca Hall, dont la présence à l’écran est somme toute trop limitée au goût des spectateurs masculins. Quant à (sir) Ben Kingsley, il casse la baraque dans son rôle de Mandarin débridé et, pour une fois, son personnage n’est pas sacrifié sur l’autel du conformisme et de l’efficacité. Au contraire : la scène la plus drôle du film, et croyez bien que vous la reconnaîtrez aisément, lui doit absolument tout.

Non, le vrai souci provient du scénario, et plus précisément de l’agencement des événements. À Shane Black qui voulait que son film ressemblât davantage à un roman géopolitique de Tom Clancy qu’à un banal récit d’action, on répondra gentiment que n’est pas expert en ce domaine qui veut. Tous les éléments étaient pourtant réunis : un terroriste international insaisissable et anxiogène, des explosions mortelles qui ébranlent l’Amérique, un président mis sur la touche (joué par le génial William Sadler), des vilains possédant le pouvoir de se régénérer, un Tony Stark qui voit sa somptueuse villa de Malibu partir en fumée – et le symbole de son orgueil démesuré avec… Et, hasard de l’actualité, les angoisses du film trouvent leur matérialisation dans la réalité des attentats de Boston, une tragique application de la terreur installée par le Mandarin. Voilà une jolie grenade qui fait pschitt, parce que le scénario n’est jamais capable d’enfiler ses perles autrement que dans le plus grand désordre, oubliant là des personnages (Rebecca Hall qui disparaît des écrans radars), proposant ici d’improbables rebondissements, concluant enfin avec une bataille imbuvable, située dans un décor qui rappelle celle de "L’Arme fatale" mais en version grotesque, polluée par des dizaines d’armures Iron Man qui volètent dans les airs aussi gracieusement que les hippopotames en tutu de "Fantasia".

Parmi la troupe hétéroclite des super-héros Marvel à avoir trouvé les chemins du grand écran, Tony Stark / Iron Man était le plus intéressant, parce que le plus adulte et le plus cynique (on est loin, en effet, du premier degré épuisant de Captain America). Il semblerait en fait que l’intérêt porté à Tony Stark avait à voir avec son ambiguïté primordiale, celle d’être à la fois un génie des sciences et un effronté vendeur d’armes transformé involontairement en sauveur des opprimés. On aimait, en fait, son côté Tony truand. "Iron Man 3" entérine en quelque sorte son passage à l’orthodoxie du super-héros, raison pour laquelle il ne faudra désormais plus attendre de lui aucune surprise, sinon en compagnie de ses camarades encapés dans "Avengers". Et si Shane Black n’est pas parvenu à freiner ce mouvement vers l’académisation du personnage, ne rêvons pas : personne ne le pourra plus.

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