© Universal Pictures International France
En France, sous l'occupation, les allemands sévissent dans les campagnes, et Shosanna, une jeune juive, voit sa famille se faire exécuter par les hommes du Colonel Hans Landa. Trois ans après cet épisode traumatisant, Shosanna, qui se fait dorénavant appeler Emmanuelle, tient un cinéma en plein Paris. Du côté américain, un escadron de kamikazes, les Basterds, s'est formé pour rendre justice sur le sol français. Ses membres ont pour coutume de scalper leurs victimes. Alors qu'une avant première d'un film allemand est organisée dans son cinéma, une opération commando se prépare...
Déclinant en cinq chapitres son « histoire de salauds », Tarantino a choisi cette fois-ci de s'attarder sur une époque de l'histoire de l'Europe, qui taraude pas mal de réalisateurs américains dernièrement, notamment après « The Good German » de Soderberg et « Walkirie » de Singer. Tarantino propose de montrer le rôle qu'aurait pu jouer un cinéma pendant la seconde guerre mondiale en France. Lieu de culture où se retrouvent toutes les nationalités, même dans un climat hostile, le cinéma est le centre de tous les intérêts et les convoitises.
D'ailleurs, comme dans tous ses films, Tarantino met en scène son amour pour les westerns et pour le cinéma européen, notamment ici le cinéma français. Il cumule les références aux films de cowboys, entre les surnoms donnés aux membres du gang des « Basterds » (Aldo the apache...), les techniques de mutilation comme le scalp, ou encore les musiques à la Morricone. Et côté cinéphile, on trouve des références à des classiques du cinéma français, tels que « Le Corbeau », « L'assassin habite au 21 », Henri George Clousot, Danielle Darieux, et même à l'UFA. D'ailleurs, on sourit devant une des répliques de Mélanie Laurent, qui dit à Daniel Brühl (craquant, en jeune soldat allemand): « Je suis française, nous respectons les réalisateurs » ! Peut-être devons nous voir là un clin d'oeil à l'industrie du cinéma américain...
Niveau casting, Tarantino a sorti l'artillerie lourde. Et malgré un Brad Pitt, excellent dans son rôle de meneur de troupes kamikazes et barbares, la palme de l'interprétation masculine revient à Christopher Waltz, en colonel nazi impitoyable, cultivé et cynique, surnommé « le chasseur de juifs », qui est parfait en enquêteur et homme de lettres. Il arrive même à éclipser les autres têtes d'affiche masculines. Côté femmes, c'est un grand cocorico pour Mélanie Laurent, qui par sa froideur et sa beauté, personnifie une France rebelle et libre, et en éclipse presque la belle Diane Kruger, dont l'accent allemand est à la limite du contestable !
On pourrait trouver que Tarantino réitère ce qui sont maintenant ses « codes » - histoire déclinée en chapitres, musique omniprésente et au volume poussé à fond, hémoglobine à foison, les joutes verbales interminables justes faites pour créer un espace de respiration pour répartir sur un rythme effréné, son cynisme, son humour, et une justice implacable qui punit toujours les méchants – et qui pourraient donc lassés. Mais bien au contraire, la patte Tarantinesque absente d'un film de Tarantino, c'est un peu comme une tartiflette sans reblochon... ça manquerait cruellement de saveur, non?!
« Inglorious Basterds » est un très bon Tarantino, divertissant, sanglant, drôlissime, et tout simplement jubilatoire.
CONTRE: Niveau 0 – Tout pour faire plaisir au spectateur... même réécrire l'histoire ?
Le film commençait plutôt bien, offrant une magnifique scène d'ouverture rurale, pleine d'une palpable et coupable tension, à la manière d'un western revisité, posant au passage le personnage le plus captivant du film, le « chasseur de juifs » pour lequel l'autrichien Christoph Waltz a obtenu un mérité prix d'interprétation masculine. Puis le film prenait un tournant bande dessiné, présentant un à un les membres du commando des Basterds tous cartoonesques à leur manière, avec en tête un Brad Pitt au sidérant accent texan, une impressionnante cicatrice lui ceinturant le cou.
Mais malheureusement, à trop vouloir amuser la galerie, Tarantino en délaisse l'action au profit de dialogues interminables. Il s'écoute écrire. Certes certaines transitions sont des plus réussies, comme les dialogues amenant à la conclusion qu'il vaudrait mieux parler tous anglais pour se comprendre ! Pourtant plus le film avance plus le temps semble long, la palme revenant à la scène de cabaret, et de jeu de carte façon « Qui est-ce? », aussi inutile qu'à peine drôle. Et les éclairs de violence se font rarissimes, au profit de multiples références que seuls les plus cinéphiles seront capables de décoder.
Au fil de sa carrière, les films de Tarantino, parfaitement maîtrisés techniquement, ressemblent de plus en plus à des coquilles vides, remachage stylisés d'autres films, où tout est fait pour caresser le spectateur dans le sens du poil. Sauf qu'ici Tarantino s'attache à la grande Histoire, qu'il réécrit à sa sauce, en changeant le cours pour mieux satisfaire les esprits vengeurs et sanguinaires. Que penser de cette fin, pure fiction, ou même du personnage de Mélanie Laurent, jeune juive épargnée dans la première scène, d'un creux sidérant ? Il paraît que Tarantino veut encore rajouter quelques 8mn à son film. Il ferait mieux de doser ses dialogues comme ses effets, et d'en couper une bonne demi-heure.
Cinémas lyonnais
Cinémas du Rhône
Festivals lyonnais