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Alors que Manhattan est étrangement survolé par une pyramide, le symbole d'une résistance presque disparue, est réveillé par accident. Horus, Dieu du ciel s'empare alors de son corps, espérant retrouver une jeune femme capable de lui assurer descendance…
Adapté de sa trilogie Nikopol, célèbre bande dessinée d'Enki Bilal, Immortel est un récit mêlant déités d'un monde disparu, technologies futuristes, extra terrestres, politiciens véreux, savant fous et être innocents et intègres. Pour donner vie à ce monde improbable, mais pas si éloigné du notre, Bilal a choisi d'utiliser dessin, images de synthèses et êtres de chair et d'os. Et le monde qu'il construit, fait de métal et de grisaille, est l'un des plus réussi qu'il nous ai été donné de voir. Bien entendu, l'animation des visages de certains personnages humains ou mutants n'est pas encore parfaite, mais les mouvements de leurs corps deviennent d'une impressionnante fluidité. Et leur confrontation avec les rares véritables humains n'a rien de choquante après quelques instants.
Le discours sur l'aliénation de l'être humain, son contrôle par des intérêts politiques et financiers supérieurs, et le peu de place fait aux valeurs et à l'intégrité est des plus troublant. D'autant qu'ici, le rôle du Dieu est des plus ambiguë. Agissant dans un intérêt qui lui semble propre, cet homme à tête de faucon ou d'aigle, est à la fois moralement réprouvable et d'un cynisme à tout craint. Face à lui, on découvre l'excellent et diablement viril Thomas Kretschmann, interprète de Nikopol, et symbole de l'intégrité de l'homme. Linda Hardy et Charlotte Rampling, un rien monolithiques, s'en tirent plutôt bien, jouant à fond la carte du mystère.
Ce monde aux facettes et origines multiples est d'une richesse qui mérite certainement plusieurs visionnages. Il regorge de mystérieux personnages, tel l'extra terrestre John, d'espèces de requins marteaux rouges, aux canines métalliques acérées, ou encore de mutants plus ou moins lobotomisés. Tout ce bestiaire, des plus inquiétant, construit un monde cohérent, qu'il est difficile de quitter. Entre romantisme, fatalité et désir d'un avenir meilleur, Bilal nous conte le futur de l'humanité et ses possibilités de rédemption. Une véritable réussite, qui espérons le, s'exportera bien.
Second avis
New York 2095 : une pyramide flottante au-dessus de Manhattan. Une population de mutants, d'extraterrestres, d'humains, réels ou non. Une campagne électorale. Un dieu à tête de faucon qui n'a que sept jours pour préserver son immortalité. Un dissident subversif congelé depuis trente ans et une jeune femme sans origine connue, aux cheveux et aux larmes bleus… Horus, Nikopol et Jill sont trois êtres aux destins convergents où tout est truqué : la voix, les corps, les souvenirs. Tout sauf l'amour qui surgit comme une délivrance.
Dès le générique avec une musique envoutante, le spectateur est plongé dans l'univers fantastique d'Enki Bilal, un monde iréel et paradoxalement si proche du notre. Ce monde où se mêle humains, et mutants est insituable même si l'on sait que la scène se passe dans la Big Apple en 2095. On ose même pas imaginer que dans le futur, la terre pourrait être ainsi, mais là n'est pas la question. On se laisse prendre au jeu du graphisme, des couleurs et des vers de Baudelaire.
Enki Bilal nous emmène là où les voitures circulent dans le ciel (mais toujours avec des feux aux carrefours), des dieux jouent au monopoly, des humains cotoient mutants et divinités égyptiennes. Ce qu'il garde également de la réalité, c'est le contexte électoral, les magouilles politiques et le problème de l'eugénisme par l'intermédiaire de la firme Eugenics. Le film soulève des questions sans l'air de rien...
Les personnages et les acteurs (même ceux dont on ne connaît pas le vrai visage)sont magnifiques. Le duo linda Hardy (Jill) et Thomas Kretschmann (Nikopol) fonctionne très bien. Pour son premier grand rôle au cinéma, l'ancienne miss France nous prouve son talent d'actrice, à tel point que l'on a le sentiment que le personnage a été crée pour elle. Le choix judicieux de la couleur bleu pour les larmes et les cheveux de Jill n'est pas étrangère à ce charme mystérieux. Le jeu si l'on peut l'appeler ainsi, entre l'entité divine Horus et l'humain Nikopol, est très troublant. Leur relation avec Jill l'est encore plus : ce trio ambigu rajoute de l'intensité au film. Si on va au-delà de l'histoire, on pourrait voir avec Nikopol/Horus la métaphore de l'être humain tiraillé par son double maléfique et avec lequel il doit s'allier pour pouvoir s'accepter. La transformation de Jill retrace à sa manièr e celle de l'humain (de la naissance à l'état adulte). Quant à celui d'Horus, c'est la peur de la mort, de sa propre disparition, qu'il incarne.
Du début à la fin, on est pris dans l'engrenage de l'histoire de cette drôle de mutante et de ce mystérieux duo formé par Nikopol/Horus. La poésie de Baudelaire est en parfaite adéquation et en harmonie avec l'atmosphère du film et des idées qui s'en dégagent. La fin où l'on découvre Jill avec un livre entre les mains « Les fleurs du mal » de Baudelaire, et ces mots prononcés en français, les seuls dans la version originale du film, ont encore plus de poids « Mais tout ça ne vaut pas le poison qui découle de tes yeux… ». La musique finale interprétée par Venus « Beautiful days » conclut le film en beauté.
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