© Les Films du Losange
Alors que Jakob croupit en prison pour acte de rébellion, Jettchen se retrouve enceinte de Gustav, le frère aînée de Jakob, avec lequel elle a eu une relation lors de la fête du village. Pour conserver leur honneur, ils doivent se marier. Parallèlement, Margarethe, la mère de Jakob et Gustav, voit sa santé décliner...
Ce deuxième chapitre se recentre sur l'histoire d'un exil inévitable et d'un foyer qui meurt à petit feu. La tyrannie des seigneurs, qui avait clos le premier chapitre avec l'emprisonnement de Jakob, ainsi que la misère générale sont encore plus pesantes et rendent l'exode inéluctable. Ainsi, alors que le chapitre précédent avait son lot d'espérance, cette seconde partie est beaucoup plus pessimiste (l'évolution étant déjà annoncée par les titres des deux chapitres). Alors que son côté rêveur rendait Jakob plus ou moins insociable et marquait son refus d'accepter la vie miséreuse de son village, ce personnage a brutalement mûri. S'il n'a pas totalement abandonné ses rêves ni sa douce folie, il se voit contraint d'être plus pragmatique face à la cruelle réalité qu'il prend de plein fouet : il subit un dur séjour en prison, son frère finit par lui voler successivement sa bien-aimée et ses rêves d'Amérique, et sa mère est en très mauvaise santé.
Le poids des traditions et de la pression sociale, qui conduit Jettchen à se marier avec Gustav, est plus tangible dans ce chapitre, qui prend alors quelques allures de réquisitoire. C'est notamment la religion qui est critiquée à travers certaines scènes, comme lorsque Gustav réagit au sermon du pasteur après la mort de sa fille et de trois autres enfants victimes de diphtérie durant la même nuit, ou encore quand Walter (le mari catholique de Lena, la sœur de Jakob et Gustav) clame ouvertement : « C'est Satan qui a créé les religions, elles n'apportent que du malheur ».
D'autre part, le lien à la terre est souvent palpable ou prend un caractère symbolique, comme lorsque Florinchen offre un sac de terre à ceux qui partent pour le Brésil. C'est aussi Florinchen qui chante « Adieu mon pays » alors qu'elle n'est pas dans le convoi des émigrants. La réflexion sur les relations entre les hommes et la terre atteint son paroxysme dans les dialogues entre Jakob et le prisonnier avec lequel il a construit une amitié durant sa détention, Franz, qui affirme que « partir vaut toujours mieux que mourir ici ». Plus tard, quand le même Franz avance que « les hommes sont partout les mêmes », Jakob le contredit en expliquant que les hommes changent en fonction de la terre sur laquelle ils vivent : « sinon personne n'émigrerait ». C'est aussi chez Franz que Jakob dessine une carte à la craie sur une table, inscrivant ainsi de façon prémonitoire le caractère éphémère et instable de ses rêves de voyage. Et c'est toujours chez Franz que Jakob applique le concept d'« Heimat » à sa propre situation : « je suis donc exclu de ma maison natale, il me reste l'amour de ma mère qui n'a jamais cessé de me donner la vie encore et toujours ».
Ce lien terre-mère (et donc les symboliques maternelle et nourricière du concept d'« Heimat ») est également plus fort dans ce deuxième opus. Le rôle de Margarethe, la mère de Jakob, prend bien plus de place que précédemment, au point de devenir un des enjeux majeurs du récit. La pneumonie et la lente agonie de Margarethe devient l'allégorie d'une patrie qui meurt mais qui s'accroche au peu qui lui reste (plus largement, à travers elle, c'est le parallèle entre famille et patrie qui est ainsi mis en évidence). Inversement les pères semblent plus prompts à baisser les bras : après une décennie de silence le père de Jettchen se suicide, et le père de Jakob et Gustav manque de mourir sous un éboulement en tentant désespérément de trouver un soi-disant trésor dans les ruines d'un château pour éviter l'émigration de son fils aîné.
Ainsi, ce deuxième épisode épouse bien plus que le premier ce riche concept allemand d'« Heimat » qui constitue la colonne vertébrale de la longue saga d'Edgar Reitz.
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