© Haut et Court
En 1955, dans une petite ville de l’État de New York, les jeunes filles sont en proie à toutes les humiliations. Dans cette société du milieu du siècle ne donnant que peu de crédit à la gente féminine, les hommes, jeunes ou moins jeunes, n’hésitent pas à les traiter sans égards juste parce que ce sont des filles et qu’elles n’auront jamais le cran de se venger. Legs, une jeune adolescente rebelle ne l’entend pas de cette oreille et décide de monter un clan, exclusivement composé de filles, qui se vengeraient de l’indélicatesse des hommes…
Couronné de la palme d’or en 2008 avec « Entre les murs », Laurent Cantet renoue avec les thèmes de son précédent long-métrage : les effets de groupe, l’intégration dans un clan et les relations adolescentes. « Foxfire, confessions d’un gang de filles » est la seconde adaptation au cinéma du roman « Foxfire » de Joyce Carol Oates qui avait déjà vu son livre se faire transposer à l’écran par Annette Haywood-Carter qui avait alors offert à Angelina Jolie sa première tête d’affiche. A contrario de la réalisatrice américaine qui avait choisi de placer le récit à l’époque contemporaine, Laurent Cantet a, lui, préféré rester au plus près du matériau original en conservant comme contexte les années cinquante et l'Amérique.
À l’époque, les hommes n’ont que très peu d’égards envers les femmes, et cruauté adolescente oblige, les jeunes filles sont les premières à subir cette domination. Cependant, au lycée, un groupe de filles s’élève contre cette oppression masculine. Portées par Legs, une féministe avant l’heure bien décidée à se rebeller contre les mœurs de la société, elles vont d’abord former un groupuscule et mener de petites expéditions punitives et divers actes de vandalismes pour ainsi bouleverser l’ordre établi dans leur petite ville natale. Dans un idéalisme rabâché par Legs instrumentalisant le machisme, à la manière d’un Tyler Durden dénonçant le consumérisme, ce groupe finit par former un clan, s’auto-suffisant et coupé du monde. Si elles ont des rêves pleins la tête, les problèmes d’égos et de manque d’argent vont très vite lézarder leur modèle de vie.
C’est ce passage entre l’euphorie utopique et les premiers heurts face à la réalité du groupe qui est le plus fascinant. Cantet prend son temps pendant le bon premier tiers de son film, permettant au spectateur d’adhérer à l’idéal de ces filles tout en écoutant Maddy, meilleure amie de Legs et co-fondatrice du clan, prenant peu à peu de la distance vis à vis des faits qu’elle nous narre. Dès lors que le rêve se lézarde, une certaine nostalgie nous étreint. L’incroyable énergie juvénile du départ se mue peu à peu en une atmosphère gorgée d’inquiétudes et de doutes quant à la viabilité de ce projet de vivre ensemble.
La distribution, composée quasi-exclusivement de jeunes actrices non-professionnelles, est impeccable. La cohésion du groupe est palpable et celles-ci nous offrent quelques scènes passionnantes (Legs adoptant les manières de la haute bourgeoisie tout en gardant un regard inquisiteur sur ses hôtes...) ou simplement sublimes comme celle du rite d’initiation au tatouage qui semblerait presque hors du temps. Et c’est en grande partie sur ces actrices que repose toute la puissance de ce dernier film de Laurent Cantet.
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