affiche film

©Diaphana Films

ENFER (L’)


un film de Danis Tanovic

avec : Emmanuelle BĂ©art, Karin Viard, Marie Gillain, Carole Bouquet, Guillaume Canet, Jacques Gamblin, Jacques Perrin, Jean Rochefort


Un homme sort de prison dans les annĂ©es 80
 Sophie, CĂ©line et Anne sont trois soeurs vivant chacune leurs vies de leur cĂŽtĂ©. Le lien familial est rompu. Sophie, l'aĂźnĂ©e, est mariĂ©e Ă  Pierre, un photographe avec qui elle a eu deux enfants. Leur couple vacille. Pierre la trompe. CĂ©line, cĂ©libataire, est la seule Ă  s'occuper de la mĂšre impotente placĂ©e dans une maison de retraite. Anne, Ă©tudiante en architecture, a une relation passionnelle avec FrĂ©dĂ©ric, l'un de ses professeurs. Un jeune homme va entrer en contact avec CĂ©line. SĂ©bastien, plein de charme, semble vouloir la sĂ©duire. La rĂ©vĂ©lation qu'il va lui faire va rapprocher les trois soeurs, leur permettre d'accepter leur passĂ© et peut-ĂȘtre d'oser vivre pleinement



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Photo film

TragĂ©die de l’amour

L’enfer est un film Ăąpre, inconfortable, terriblement actuel. A travers les portraits croisĂ©s de trois sƓurs aux prises avec des amours contrariĂ©s, Tanovic Ă©rige une grande tragĂ©die moderne, oĂč l’adultĂšre n’est finalement qu’un moyen pour sonder de l’intĂ©rieur la dĂ©tĂ©rioration des sentiments. Ainsi les trois soeurs souffrent moins d’ĂȘtre femme trompĂ©e, amante d’un homme mariĂ© ou femme sexuellement apathique, que du dĂ©laissement affectif qu’elles subissent. La figure de l’absence du pĂšre (ou de l’époux) est prĂ©sente dans chacun des tortueux recoins du rĂ©cit.

PrivilĂ©giant l’intensitĂ© dramatique au suspense psychologisant, Tanovic fait du drame fondateur et originel le moment oĂč cette Ă©rosion des sentiments se mue en violence, oĂč l’important est moins la rĂ©vĂ©lation de ce drame que son impact Ă©motionnel. Le cinĂ©aste contrĂŽle cet aspect profondĂ©ment viscĂ©ral avec une maĂźtrise formelle impressionnante. Ses plans, ses cadrages et son utilisation de la lumiĂšre mettent Ă  l’amende l’immense majoritĂ© de la production francophone actuelle.

MĂȘme si l’auteur de No Man’s Land se fait parfois trop dĂ©monstratif et faussement dĂ©miurgique lorsqu’il cite MĂ©dĂ©e, convoque de lourdes rĂ©fĂ©rences philosophiques ou disserte vainement sur le destin, l’impact de sa rĂ©alisation n’est jamais remis en question. Il est mĂȘme confondant qu’on ait le sentiment d’assister Ă  pareille tragĂ©die quand les enjeux du scĂ©nario ne font finalement appel qu’à des micro-drames contemporains. Qui plus est, le casting est dĂ©mentiel. Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas vu une Emmanuelle BĂ©art si intense, presque animale (Ă©norme scĂšne de rupture avec Gamblin), longtemps qu’on n’avait pas vu Karin Viard si sobre, et les autres sont au diapason.

Jusqu’au-boutiste, Tanovic ne cĂšde jamais au pathos, rejette tout sentimentalisme malvenu, et achĂšve ce bel ouvrage par un final implacable oĂč rien ne pardonne et n’excuse les passions contrariĂ©es. Chacun repart dos Ă  dos, avec son amertume, son incomprĂ©hension, sa blessure. La vie, l’enfer.

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