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Frappé par un article sur un tueur à gages de la frontière américano-mexicaine, le cinéaste Gianfranco Rosi lui donne rendez-vous clandestinement et enregistre le récit de vie du « sicario »...
Rendu populaire grâce au film éponyme de Denis Villeneuve, le terme « sicario » désigne un tueur à gages engagé par les cartels des narcotrafiquants mexicains, dont le code d’honneur implique une expertise dans des domaines aussi radicaux que le kidnapping, la torture et le meurtre. C’est à l’un de ces tueurs – en l’occurrence fugitif – que s’intéresse ici le documentariste Gianfranco Rosi, avec la ferme intention de creuser réellement le fonctionnement interne et le parcours de la personne en question. L’homme ayant vu sa tête mise à prix par ses anciens patrons pour 250 000 dollars, son visage restera caché sous un tissu durant tout le film. Toutefois, au-delà du témoignage pur et d’un dispositif cinématographique des plus austères (en gros, une interview face-à-face dans une chambre de motel), Rosi décale son désir de cinéaste vers autre chose, en l’occurrence moins le récit que le croquis d’une vie.
Durant une large majorité de l’entretien, le tueur gardera avec lui un cahier sur lequel il crayonnera différentes informations (dessins, schémas, organigrammes …), donnant ainsi l’impression que le film dessine le story-board paraphrasé d’une existence terrible – intéressant parti pris. Le reste du temps, lorsque le cahier est laissé de côté, on en revient à un mode documentaire proche du cinéma de Rithy Panh, qui vise, comme dans le tétanisant "S-21", à laisser un homme répéter ses propres gestes d’ancien bourreau. Le relief des scènes est moins fort que chez Panh (question de regard et de mise en scène, avant tout), mais le tueur ose néanmoins alterner ses gestes avec ceux de ses victimes passées, faisant ainsi se rejoindre deux actions (l’acte de violence et l’empathie vis-à-vis de la souffrance d’autrui). Consciemment ou non, ce documentaire fait soudain office de vecteur cathartique – c’est là que réside son unique force de frappe. Mais a contrario d’un Rithy Panh qui usait de perspectives narratives diverses pour garder l’attention de son audience, pas sûr que le spectateur réussisse ici à tenir le coup en raison d’une mise en scène au rythme trop régulier, pour ne pas dire inexistant.
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