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Léa de Lonval achève au début du vingtième siècle sa resplendissante carrière de coutisane. Elle accepte, à la demande d'une ancienne rivale, de prendre en charge l'éducation sexuelle de son fils, surnommé Chéri, qui ne semble guère s'attacher aux femmes...
Le film s'ouvre sur une jolie introduction présentant les différentes « prostituées » célèbres de la belle époque, sous forme de jeu de vieilles cartes, éventuellement postales ou de photographies. Une voix-off omniprésente (celle du réalisateur) nous offre un cynique recul critique, dressant moult portraits au vitriol, et nous accompagnant encore quelques instants. Cette adaptation du roman homonyme de Colette apparaît rapidement comme d'une actualité et d'une acuité édifiante quant aux rapports passionnels. Si les tourments amoureux et autres arrangements de l'époque paraissent un rien désuets, on se régale des joutes verbales assassines entre Michelle Pfeiffer et Kathy Bates, cette dernière interprétant la mère de Chéri, ancienne prostituée à la langue de vipère, aussi exubérante qu'outrancièrement habillée (ses tenues incroyables provoquent l'hilarité). Et l'on se laisse rapidement bercer tant par la petite musique de la jeunesse insatisfaite, de l'apprentissage de la souffrance et de l'amour, que par la magnifique partition en bande sonore.
D'autant qu'après deux ans, et quelques apparitions remarquées dans la comédie musicale « Hairspray » (2007) et le conte fantastique « Stardust, le mystère de l'étoile » (2008) où elle interprétait à nouveau une sorcière, Michelle Pfeiffer revient enfin sur le devant de la scène grâce à Stephen Frears. Engoncée dans ses corsets, le cheveu frisé impeccablement incurvé, la belle évolue dans des décors fastueux, un luxe acquis du fait de sa beauté de femme à vendre et pourtant totalement indépendante d'esprit. De son vieillissement progressif rien ne transparaît, son attitude restant celle d'une femme conquérante, libre et frivole, qui lui vaut de recevoir la lourde tâche d'éduquer Chéri, jeune homme farouche que les flèches de Cupidon ne semblent pouvoir atteindre. Bien entendu, rien ne se déroulera comme prévu, malgré les conventions de l'époque, et les liens s'avèreront tenaces.
Le piège de la dépendance, la différence d'âge en amour et le vieillissement sont donc au cœur de ce film remarquablement écrit, la plupart des dialogues de Colette ayant été conservés par Christopher Hampton, scénariste habile (« Carrington », « Reviens-moi », « Les liaisons dangereuses ») amenant même de la drôlerie dans les confrontations les plus assassines. Michelle Pfeiffer resplendit littéralement dans ce rôle de femme alliant grâce de la beauté et de l'attitude, qui subira elle même un cuisant retour de flamme, qu'elle ne saurait maîtriser. Saluons donc son retour de femme, élégante, droite et lumineuse, dans un cinéma auquel elle aura rudement manqué.
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