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Après la première guerre mondiale, Georges a décidé d’oublier les horreurs du front du côté de l’Afrique. Mais un événement dramatique l’oblige à revenir dans l’hexagone, dans une famille où les affrontements ont laissé de nombreuses blessures que le temps n’a pas su guérir…
Le film d’époque est toujours un pari audacieux pour un metteur en scène, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’un premier passage derrière la caméra. Pour réussir son défi, Emmanuel Courcol, connu notamment pour être le scénariste attitré de Philippe Lioret, s’est entouré d’une équipe solide, aussi bien chez les comédiens que les techniciens (Tom Stein, chef opérateur de Clint Eastwood est ainsi de la partie). L’histoire est celle de Georges, héros de guerre parti oublier les horreurs du front du côté de l’Afrique. Mais c’est aussi celle de Marcel, frère du premier, muré dans le silence depuis son retour, qui retrouve progressivement plaisir à l’existence avec la belle Madeleine. Et puis, "Cessez-le-feu" est également le destin d’Hélène, ancienne infirmière devenue professeure en langue des signes, femme moderne avant l’heure.
Avec son scénario complexe, aux multiples ramifications, le métrage avait tout pour s'éparpiller jusqu'à perdre le spectateur. Pourtant, la caméra d’Emmanuel Courcol épouse les corps comme rarement, multiplie les petits détails et les silences assourdissants, pour nous offrir une œuvre simple et forte, pudique et intense. Capturer les années folles en minimisant les artifices. Oser le classicisme et le large spectre chromatique. Le cinéaste assume ses choix et saisit l’air d’une époque où les survivants se sentent coupables et où les traumatismes de la guerre sont partout, dans ce sommeil impossible à trouver comme dans la manière frénétique avec laquelle Georges se lave la nuque. Derrière le bel emballage, les thématiques se croisent avec brio, la noirceur progressant à chaque respiration. Instinct de vie et instinct de mort se confondent dans ce drame bouleversant, maîtrisé et élégant.
Si la trame narrative trop prévisible et le manque d’espace pour faire coexister toutes les ambitions empêchent le film de véritablement prendre son envol, le numéro des comédiens vaut largement un détour par la case Cinéma. Romain Duris est une nouvelle fois excellent, tout en pilosité et rage contenue. Quant à Grégory Gadebois, il s’affirme définitivement comme un acteur qui compte, capable de vous faire fondre en larmes d’un seul regard. Bien épaulés par Céline Sallette, leurs prestations participent grandement à l’enthousiasme suscité par ce premier long métrage. Beaucoup de scénaristes passent un jour derrière l’objectif, mais peu le font avec autant de grâce. On attend donc avec impatience la prochaine étape.
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