©haut et court
Lucie est fan de Lauren Waks, la nouvelle icône de la variété française. Un jour, Lauren arrive chez Lucie pour une émission de télé-réalité. Cette rencontre imprévue va traumatiser Lucie qui décide de monter à Paris pour rencontrer à nouveau son idole…
Emmanuelle Bercot avait été découverte avec un film d’auteur magnifique mais confidentiel, porté par un succès critique incontesté, et surtout incontestable (Clément). Aujourd’hui, elle nous revient avec un film d’auteur grand publi, Backstage, sorte d’ovni du cinéma français, à mi-chemin entre film populaire (les chansons de Lauren Waks ne sont pas sans rappeler les nouvelles idoles de la variétoche à la française, façon Mylène Farmer) et film dramatique (une réelle critique de la société, et des scènes particulièrement difficiles). Rarement une réalisatrice n’aura su tirer autant de ses acteurs, ou plutôt de son actrice fétiche (Isild Le Besco) pour nous livrer une réflexion sur la vie et la société, avec autant de justesse.
Sans cesse sur le fil, Emmanuelle Bercot nous propose une vision désabusée tant de la vie d’artiste que de la vie de fan. Sa Lauren est complètement dépressive, rongée par le succès, sa popularité… et aspirant à une vie à mi chemin entre luxe excessif, et simplicité maladive. Son entourage n’est pas en reste, tous plus cinglés les uns que les autres, ils entourent la star de son halo de mystère et d’impénétrabilité. Que dire alors du personnage de Lucie ? Lunaire, dramatique, effrayant… les qualificatifs ne manquent pas, pour une jeune fille aussi manipulée que manipulatrice tout au long du film. Un rôle magnifique, particulièrement bien écrit pour la muse de la réalisatrice, Isild Le Besco.
Cette dernière nous prouve une fois de plus s’il en était besoin son talent pour les rôles difficiles. On l’avait déjà découverte en adolescente blessée dans La Puce, moyen métrage de cette même Emmanuelle Bercot, avant sa rencontre avec Benoît Jacquot pour Sade, et d’autres tours de force encore comme Roberto Succo, ou Demi-Tarif, sa première réalisation. Isild est ici encore époustouflante. Une beauté étrange pour cette fille au regard qui vous transperce et qui reste toujours généreuse dans ses rôles. Une fois encore, elle donne tout, et apporte une puissance supplémentaire à son personnage, déjà complètement névrosé.
Décidément, Emmanuelle Bercot réalise un magnifique tour de force avec ce film, parvenant à changer totalement l’image d’une Emmanuelle Seigner transformée, à tirer le meilleur d’une Isild Le Besco au top de sa forme, mais aussi à s’entourer de seconds rôles particulièrement crédibles tels Samuel Benchetrit, sorte d’élément rassurant de ce film qui ne l’est pas… Un tour de force technique aussi, puisqu’elle multiplie les scènes d’enregistrement, de studio, de télé et surtout un concert dès la scène d’ouverture, où l’on se croit réellement dans l’un de ces shows dont La Madone a le secret.
Au final, Backstage est un film à voir absolument. Particulièrement émouvant, il livre également une réflexion intéressante sur les excès du star system et les effets pervers d’une société en perte de repères, économiques, culturels, humains et sociaux… A voir pour son scénario parfaitement écrit et ses acteurs qui, du premier au dernier, donnent le meilleur d’eux-mêmes.
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