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Shoko, une écolière sourde, change d'école primaire et rencontre un garçon nommé Shoya dans sa nouvelle classe. Face au handicap de celle-ci, Shoya devient dès lors son souffre-douleur et incite le reste de la classe à faire de même. Des années plus tard, Shoya, tourmenté par son passé, décide de retourner voir Shoko dans l'espoir de se faire pardonner pour ce qu'il a fait à l'école. Tous deux finissent par devenir amis…
L’animation japonaise n’a jamais été retardataire dans l’idée de se frotter à des sujets sensibles – pour ne pas dire douloureux – en lien direct avec l’enfance, histoire de ne pas caresser son spectateur dans le sens du poil. En témoignent les succès internationaux du "Tombeau des Lucioles" d’Isao Takahata et du "Colorful" de Keiichi Hara, respectivement centrés sur les ravages de la guerre et le suicide adolescent. Il faudra désormais y rajouter Naoko Yamada et son "A Silent Voice", qui fut l’une des plus belles découvertes de la compétition longs-métrages du Festival d’Annecy 2017. Avec du lourd en matière de sujets sensibles (l’exclusion, le handicap, le harcèlement scolaire), au travers d’un récit qui s’avère être l’adaptation du premier des sept tomes du manga éponyme de Yoshitoki Oima. Soit l’amitié progressive entre Shoya et Shoko, l’un benêt et flemmard, l’autre handicapée et fragile, qui prend racine dans un contexte d’accompagnement des élèves handicapés. Etant la seule handicapée dans sa classe, Shoko n’a que son cahier pour communiquer avec les autres et devient vite un objet de blagues qui dérivent peu à peu vers les brimades généralisées. Du moins quelques années avant que la situation ne puisse enfin évoluer dans le bon sens…
D’une certaine manière, "A Silent Voice" se fait presque le complément du bouleversant film de Keiichi Hara que l’on évoquait plus haut. On y retrouve la même simplicité du trait, la même douceur de vivre où le moindre début de tension se vit comme une agression (y compris pour le spectateur), et le même désir de se frotter à un sujet délicat sans en esquiver la violence sous-jacente. Il en résulte évidemment une première moitié assez difficile, décrivant avec sobriété la spirale du harcèlement scolaire (terme japonais : ijime). La différence, c’est que la façon qu’a Yamada de privilégier vite une vraie et grandissante ode à l’amitié lui permet de transcender ce sujet douloureux au lieu d’en atténuer l’impact. Très rapidement, les rôles évoluent en laissant le positif et le négatif se frotter l’un à l’autre au gré du temps qui passe. Le récit se concentre alors sur ses deux protagonistes en prenant soin de magnifier leur évolution psychologique, au risque de transformer les seconds couteaux en de simples faire-valoir sans grand relief. On ne voit cependant pas comment il aurait pu en être autrement au vu du sujet – un éparpillement narratif trop prononcé aurait fragilisé l’impact d’un film déjà fragile à la base. En somme, plus le récit avance, plus il semble gagner en solidité, plus son émotion s’en retrouve décuplée. Il n’en résulte rien de moins qu’un film simplement beau et délicat comme une fleur de cerisier.
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