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Dennis Nash assiste impuissant à un jugement d'éviction. Il dispose de 30 jours pour faire appel. Pourtant la saisie de la maison a bien lieu, et sa mère et lui se retrouvent à la rue avec leurs affaires. Travaillant jusque-là sur des chantiers, il décide de se faire embaucher par un agent immobilier qui tire profit de ces biens remis sur le marché...
Présenté en compétition au Festival de Venise 2014, « 99 homes » est le nouveau film de Ramin Bahrani venu deux ans plus tôt montrer "At any price", avec Dennis Quaid et Zac Efron, toujours inédit en salles chez nous. Les deux films ont indéniablement en commun de s'attaquer aux pratiques les plus répréhensibles des défenseurs d'un système capitaliste ultra-libéral. Ainsi, après les fermiers exploités ou arnaqués par les grandes firmes qui brevettent jusqu'à la plus petite semence, il s'intéresse cette fois-ci au destin des familles expulsées de leurs maisons, suite à la crise économique de 2008 et à des emprunts devenus impossibles à rembourser.
Mais au-delà de ces simples évictions, c'est à la naissance de toute une nouvelle filière qu'il s'attaque, décrivant les rouages d'un business où l'expulsé n'est qu'un pion. Continuant de scruter les injustices dont peut être victime la classe moyenne américaine, l'auteur focalise dès les premiers instants son attention sur un jeune papa, vivant avec sa mère, dont le recours à la justice vient de trouver une issue défavorable. Caméra à l'épaule, il filme l'expulsion dans le menu détail, se concentrant sur les visages, incrédules, puis bouffis de colère, de ceux qui vont devoir partir immédiatement après l'arrivée des forces de l'ordre, en laissant une bonne partie de leurs affaires dans la rue. Il donne à voir l'arrivée dans un motel synonyme de précarité, et la croyance en un retournement de situation qui s'estompe peu à peu.
En mettant son personnage principal sous pression, coincé entre la mobilisation 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 qu'exige son nouvel employeur, et les autres habitants-expulsés vivant dans le motel auxquels il doit cacher sa nouvelle activité, l'auteur pose les bases du drame à venir. Entre hésitation morale à travailler pour celui qui profite du système, appât du gain et perspective de progression rapide, la crédulité du jeune homme en une Amérique faite pour le Winners l'emporte forcément. Il faut dire que le charisme vénéneux du redoutable vendeur qu'est le personnage de Michael Shannon est particulièrement bien rendu, relayant les discours les plus odieux sous un vernis de respectabilité.
Ainsi les maisons ne sont plus que des boîtes, méprisant la dimension affective, les foyers deviennent des nombres et ceux qui assurent l'éviction avec les forces de l'ordre des robots qui répètent sans cesse le même numéro. Et ce sont justement ces moments de tensions, interpellant le spectateur au plus profond de lui-même, qui feront le réalisme de ce film qui résonne comme un avertissement pour les générations à venir. Au travers d'un scénario où bien et mal sont convoqués, c'est finalement chaque acteur de la chaîne économique qui en prend pour son grade, excès et arnaques étant autant mis en évidence que les dérives du fameux rêve américain, dans un pays « qui ne fait pas crédit aux losers ». « 99 homes » est au final un film plutôt percutant et pertinent, au message moral certes convenu, mais qui doit beaucoup au jeu du jeune Andrew Garfield ("Boy A", "The Amazing Spiderman"), subtile mélange de sensibilité à fleur de peau et d'assurance feinte.
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